J’ai le plaisir de vous présenter Anne du blog Aller voir ailleurs si j’y suis. Cette jeune femme a décidé de tout plaquer pour partir faire un tour du monde. Quelle idée me direz-vous ? Et bien c’est ce que nous allons découvrir au travers de cette interview qu’elle a très gentiment accepté.
Best Of : 9 mois à la rencontre de ces français du bout du monde from Anne Sellès on Vimeo.
Bonjour Anne. Pour ceux qui ne te connaissent pas encore, peux-tu te présenter en quelques mots ?
Je suis une fille blonde, née un certain vendredi de septembre de l’année 1986, dans une clinique de Montpellier. J’ai grandi dans ma ville natale et suis « montée » à Paris après mon bac pour faire des études en communication. Puis j’ai commencé à bosser.
En 2013, tu décides de tout plaquer et de partir pour un voyage de 10 mois autour du monde. Que s’est-il passé ?
Je bossais donc en marketing web depuis plus de 2 ans. C’était une expérience très riche sur de nombreux plans mais très intense, et une fois le cap des 2 ans passés dans la boîte, j’ai rapidement ressenti le besoin de changer. En parallèle, Paris m’oppressait, je rêvais d’évasion longue durée. J’avais pensé à partir vivre à l’étranger mais je ne savais pas comment m’y prendre. Quoi faire ? Où ? Comment ? J’ai alors pensé à « juste » partir en voyage et à rencontrer ceux qui avaient pris cette grande décision : celle de partir. S’expatrier, s’exiler, ou juste tenter une aventure différente. Je voulais connaître leurs raisons, savoir comment était la vie pour eux aujourd’hui, et découvrir s’ils avaient trouvé ce qu’ils étaient venus chercher.
Comment prend-on la décision de tout plaquer ? Était-ce un coup de tête ou bien as-tu pris le temps de préparer ton projet ?
L’idée de faire un tour du monde n’est pas sortie de nulle part. J’y pensais depuis un moment, mais sans vraiment rien faire pour que ça arrive (je ne mettais pas beaucoup d’argent de côté, notamment), jusqu’au jour où une amie et collègue de travail m’a fait un rapide calcul me prouvant que si je mettais 1000€ de côté à partir de « maintenant », je pourrai partir « dans 8 mois », à l’époque. J’avais déjà une petite somme d’argent de côté, je savais qu’en acceptant aussi d’autres petites missions me faisant travailler le week-end, il était tout à fait possible de mettre ce projet sur pied. La décision de me lancer dans ces grandes économies d’argent fut prise très rapidement, mais après, ce furent 8 mois de préparation intensive.
Comment as-tu choisi tes destinations ?
En fonction de mes envies. J’ai juste dû faire attention aux saisons pour ne pas atterrir dans certains pays en pleine mousson, par exemple.
Comment as-tu été accueillie par les habitants ? Que pensent les gens de voir une jeune fille voyager seule ?
Je n’ai jamais eu aucun problème majeur, mais j’ai été plutôt prudente. L’accueil dépend évidemment des pays. En Inde – et notamment au Rajasthan, les femmes seules ne sont pas très bien vues, il faut faire attention à sa tenue vestimentaire (pantalons toujours longs, épaules toujours couvertes malgré les températures étouffantes). Je n’ai pas toujours été très à l’aise. J’ai davantage accroché avec les locaux sud-américains, plutôt que les asiatiques. Peut-être parce que je parle un peu espagnol, du coup, ça facilite grandement le contact. Mais je ne me suis jamais vraiment sentie en danger. J’ai trouvé les argentins vraiment accueillants, ainsi que les américains, les indonésiens et les népalais. Mais je suis peut-être bien tombée dans ces pays-là, et mal tombée dans les autres. Ça reste vraiment dur de faire une généralité.
T’est-il arrivé d’avoir envie de rester lors d’une de tes étapes, de ne pas vouloir continuer ?
Non. J’avais un projet à mener (celui de rencontrer les français de l’étranger), des vidéos à monter, un blog à alimenter. Je tenais à réaliser ce projet. Du coup, je ne me posais même pas la question de m’arrêter et de ne pas repartir. Mais je pense que sans projet, si j’avais « juste » voyagé, j’aurais sans doute été tentée…
Tu as fait beaucoup de rencontres, as-tu gardé des contacts, des liens privilégiés ?
J’ai gardé des contacts avec les français que j’ai interviewés. Je dois avouer que les réseaux sociaux y sont pour beaucoup. J’ai aussi gardé contact avec des voyageurs rencontrés sur la route, en suivant notamment ceux qui sont toujours en voyage. Mais j’ai également gardé contact avec quelques « locaux » vivant sur place, notamment en Argentine, en Indonésie et au Népal.
Où est-ce que les gens t’ont semblé les plus heureux ?
Difficile à dire et difficile de faire une généralité, encore une fois. En Asie, les gens semblent particulièrement sereins. C’est bien souvent lié à leurs religions, leurs courants de pensée, et certains arts de vivre en lien étroit avec la méditation.
Était-ce parfois difficile ? As-tu eu quelques frayeurs ? As-tu eu l’envie de revenir plus tôt ou d’abréger certaines étapes ?
Difficile, oui. La solitude peut être très pesante. Le manque de repères peut être angoissant. Je n’ai jamais eu envie de rentrer réellement ou de quitter des endroits prématurément. Je voulais vraiment aller au bout des choses, mais ça ne m’a pas empêché d’être soulagée parfois de quitter une ville dans laquelle je ne me sentais pas bien (comme Oruro, en Bolivie).
Et quel effet ça fait de revenir en France ?
Au début, j’étais heureuse, surtout que je suis rentrée par surprise le 24 décembre au soir. Ma famille ne s’y attendait pas, j’étais censée rentrer quelques jours plus tard. Le retour a quelque chose d’euphorique, on retrouve les gens qui nous sont chers, toutes ces saveurs et ces aliments qui nous avaient manqués, les codes, repères mais aussi le confort si agréable qu’on avait presque oublié… Puis l’euphorie disparaît et laisse place à un grand vide, à des souvenirs à la pelle, à des envies frénétiques de repartir. Le retour a été compliqué pour moi non pas immédiatement, mais après quelques mois, une fois que j’avais pris conscience que c’était bel et bien fini.
Eh bien voilà tu as fait un tour du monde ! Qu’est-ce qui est différent pour toi maintenant ?
Je n’ai pas fondamentalement changé. Mais je pense que j’ai évolué sur certaines choses. C’est difficilement « explicable », ce sont des choses plutôt imperceptibles. Depuis que je suis rentrée, je dis souvent que « j’ai toujours les mêmes problématiques, les mêmes questionnements. Finalement je n’ai pas changé. C’est ma manière de chercher à y répondre qui a changé. »
Que retiens-tu de ton aventure ?
J’ai découvert que je savais être curieuse, que je pouvais me dépasser, que j’aimais les autres, que j’avais soif d’apprendre, que j’étais capable. Je retiens surtout des choses humaines, car au-delà de tous les beaux paysages que l’on voit, c’est souvent les rencontres qui marquent le plus.
Quel conseil donnerais-tu à ceux qui voudraient se lancer dans une telle aventure ?
D’oser prendre la décision et de s’y tenir. De savoir pourquoi on le fait. D’éviter les discussions stériles avec les personnes ayant des arguments tristes du type : « Tu es fou/folle, ce sera compliqué pour retrouver du boulot à ton retour » car je trouve encore plus compliqué de rester dans un boulot dans lequel on ne s’épanouit pas. Ne pas penser que l’herbe est plus verte ailleurs, ne pas croire qu’un voyage solutionnera tous les problèmes, car les problèmes suivent même à l’autre bout du monde. Mais être suffisamment conscient de tout cela pour aborder le périple – aussi lointain et long soit-il – de la façon la plus sereine et éclairée possible. Je crois que de prendre la décision, c’est ça le plus dur, et c’est précisément pour ça que les gens ont souvent besoin de conseil. Après tout le reste (destinations, bons plans, conseils), on le trouve sur Internet et dans les guides.
Voyager, est-ce pour toi un des secrets du bonheur ?
Mais qu’est-ce que le bonheur ? 🙂 Je crois surtout que la définition du bonheur est propre à chacun. On dit souvent que le bonheur n’est pas un but en soi mais un art de vivre, une philosophie, un état d’esprit. Moi je n’ai pas encore répondu à cette vaste question, mais ce qui est sûr, c’est que j’ai vécu des moments incroyables qui m’ont rendue heureuse, et qui me donnent aujourd’hui envie de continuer sur cette voie.
Merci beaucoup Anne d’avoir joué le jeu de cette interview et merci pour avoir partagé ton expérience.
Je vous invite vivement à visiter son blog Aller voir ailleurs si j’y suis pour découvrir les photos de ses périples et aussi les vidéos des personnes qu’elle a rencontré.